Alors que l’agriculture a été soumise à différentes mesures protectionnistes au Burundi, freinant l’ambition des jeunes à se lancer librement sur des marchés prometteurs, l’initiative récente de l’armée burundaise visant à soutenir l’entrepreneuriat en s’approvisionnant auprès des fournisseurs ruraux devient plus que salutaire. Pour notre contributeur Jean Hubert KWIZERA, la création de ce genre de marché devient importante pour valoriser le savoir-faire local des jeunes ruraux.

L’armée burundaise a récemment lancé un appel aux agriculteurs locaux souhaitant approvisionner l’armée en produits alimentaires. Ils doivent s’inscrire afin de devenir de nouveaux fournisseurs dans le but de soutenir l’entrepreneuriat local. Cette décision stratégique de soutien devient plus que nécessaire pour les jeunes ruraux qui ont historiquement fait face à un protectionnisme entravant la libre circulation des produits agricoles vers les autres provinces.

Les faits parlent d’eux-mêmes. En 2023, la collecte de produits vivriers tels que les haricots, le riz, le maïs, les arachides, le sorgho, etc., dans une province pour les vendre dans une autre ou à l’étranger a été interdite dans le but de protéger la production nationale. Ce genre de mesure freine l’épanouissement des talents locaux souhaitant s’aventurer sur de nouveaux marchés et pose souvent des limites défavorables aux perspectives d’avenir de l’entrepreneuriat des jeunes agriculteurs. De plus, faire face à la concurrence des grandes entreprises quand on est jeune entrepreneur reste un défi. L’initiative rurale de transformer les matières fécales en engrais chimique face au monopole de FOMI illustre comment l’épanouissement du savoir-faire local est entravé par la concurrence des grandes entreprises.

Un dilemme survient.

Pour que le milieu rural regagne en attractivité, il ne suffit pas d’y implanter une activité économique quelconque. Il faut un environnement qui valorise le savoir-faire local et un accès au marché d’écoulement, puis laisser l’innovation faire son travail. Or, si ces dernières composantes ne sont pas là et que le libre-échange se retrouve compromis par des mesures protectionnistes, les jeunes se retrouvent face à un dilemme : soit contourner la loi en s’engageant dans la fraude, soit abandonner l’idée d’entreprendre ou s’adapter et demander des autorisations pour échanger leurs produits avec d’autres provinces.

La première option reste coûteuse pour ces jeunes, car la fraude les expose au risque de pénalités, ce qui non seulement affecte leur rentabilité, mais compromet également leur ambition de conquérir de nouveaux marchés. La deuxième option, qui consiste à abandonner ou à demander des autorisations, reste risquée. En effet, pour obtenir ces autorisations, certaines autorités locales peuvent profiter des réglementations protectionnistes en vigueur pour exiger des pots-de-vin, entraînant ainsi d’autres coûts supplémentaires qui se répercutent sur le prix de vente sur le marché, renforçant ainsi l’inflation.

Et si d’autres institutions emboîtaient le pas de l’armée burundaise ?

Ce dont les jeunes ruraux ont besoin par-dessus tout, c’est davantage de liberté d’accès au marché pour valoriser leur savoir-faire. L’initiative de l’armée burundaise est un exemple que devraient suivre les autres institutions publiques ou privées pour soutenir et faire grandir les initiatives des jeunes locaux. Si d’autres institutions, telles que la police nationale ou les écoles à régime d’internat, suivaient cet exemple, les effets des réglementations protectionnistes pourraient être atténués, et l’exposition des initiatives locales au monopole de certaines grandes entreprises, qui peuvent éclipser l’émergence de nouvelles initiatives œuvrant dans le même secteur, pourrait être réduite.

Avec la création de ce genre de marché, les jeunes ruraux dotés de savoir-faire extraordinaire pourraient ainsi émerger et lutter contre le chômage, ce qui augmenterait non seulement la productivité, mais limiterait également l’exode rural pour les jeunes cherchant des endroits où l’accès aux marchés d’écoulement est plus favorable par rapport aux milieux ruraux.

A propos de nous :

Institute for Economics and Enterprises est une Think Tank basé au Burundi qui une mission de produire une société basée sur les principes du libre marché, de l’Etat de droit et de la propriété privée.

Partager ce contenu: