Pour réussir le pari de l’entrepreneuriat, l’accès au financement est primordial. Ce financement est généralement effectué par les institutions financières en octroyant des crédits de court ou de long terme aux entrepreneurs. Ces financements jouent ainsi un rôle important dans la réussite des initiatives entrepreneuriales. Cependant, dans le pays des tambours, l’inclusion financière numérique reste faible en général et décroit encore plus chez les jeunes et chez les femmes en particulier. Ce qui emboite en retour les initiatives entrepreneuriales de ces derniers. Point avec Guy Marie Eloi, contributeur dans la campagne Kazoza Kacu.  

Au Burundi, le secteur financier est constitué principalement par 15 établissements de crédit, 55 institutions de microfinances, 15 compagnies d’assurance, les établissements de paiement ainsi que les organismes de prévoyance sociale et représentent respectivement 82,5 % du total actif, 11,2 % et 6,4 %. L’année 2020 a été marquée par l’entrée de la Banque d’Investissement pour les Jeunes (BIJE) et en 2021 de la Banque d’Investissement pour le Développement des Femmes (BIDF). L’accès au crédit bancaire des petites et moyennes entreprises est plus particulièrement assuré par la banque des jeunes, la Banque des femmes et un FIGA qui joue le rôle d’un instrument catalyseur auprès des deux institutions bancaires. Pour les Jeunes, la garantie est également offerte par le Programme d’Autonomisation Économique et d’Emploi des Jeunes (PAEEJ) créé le 07 avril 2021. Ces institutions offrent des financements adaptés aux projets initiés par les jeunes et les femmes.

Défis des microentreprises auprès des institutions financières

Malgré la présence de ces banques, le taux d’inclusion financière chez les jeunes et chez les femmes reste faible et les raisons de cette faible inclusion sont multiples et de nature différentes. Cette faible inclusion les rend moins accessible aux services bancaires en général et encore moins aux financements de leurs initiatives entrepreneuriales.

Selon les résultats de l’enquête de la Banque de la République du Burundi, l’inclusion financière est de 29% en 2022 contre 21,92 % en 2015 et les femmes et les jeunes sont moins nombreux que les hommes à utiliser les services financiers formels. Les hommes sont plus nombreux que les femmes pour les clients individuels (69,69 % contre 30,31 %). Cette même enquête a démontré que la population burundaise utilise davantage les systèmes financiers informels que les services offerts par des institutions financières formelles, que ce soit pour épargner, emprunter ou effectuer des transferts de fonds. Ce qui justifie en partie l’essence même de l’économie informelle dans le pays de Mwezi.

Ainsi, le recours aux systèmes financiers informels peut résulter de plusieurs facteurs incluant un certain nombre de verbatim « le coût des services financiers est élevé…, les taux d’intérêts sont très élevés, l’accès au crédit reste limité par le taux d’intérêt élevé appliqué par les Banques (près de 16%), les banques chargent beaucoup de commissions, nous ne comprenons pas comment les intérêts sont calculés, nous ne comprenons pas le contenu des conventions que nous signons, le manque d’éducation financière et de connaissances des institutions financières, l’éloignement des points de services des institutions formelles, les banques vendent nos hypothèques remises en garanties…» autant de considérations sur l’image que se font certains clients de la banque.

Des facteurs tels que le niveau d’informalité élevé, le manque de garanties, la petitesse de leur crédit, etc. associées à un environnement asymétrique dans lequel évolue les jeunes/femmes entrepreneurs ne font qu’augmenter la frilosité des institutions financières vis-à-vis de l’octroi du financement. D’autres considérations socioculturelles expliquent également la méfiance de prêter aux femmes par rapport aux hommes que par le manque des garanties de ces dernières. Par exemple, dans les sociétés africaines en général et au pays des tambours en particulier, ce sont les hommes qui ont le droit de possession des biens familiaux qu’ils peuvent hypothéquer. Dans ce cas, les femmes n’ont pas non plus le droit de s’endetter dans une institution financière et les femmes ne constituent pas une clientèle privilégiée pour les banques quel que soit les occupations qu’elles mènent. Cela reste généralement le panaché des hommes. C’est pourquoi peut-être la clientèle féminine serait de moins en moins présente dans le portefeuille de crédit des institutions financières burundaise, explique l’économiste Theogène Nsengiyumva.

Pistes de solutions

Sur le plan macroéconomique, le secteur bancaire occupe une place non négligeable dans l’économie burundaise. L’éducation financière est l’un des catalyseurs de la promotion de l’inclusion financière. Les institutions financières devraient organiser des séances de formation à l’endroit des microentrepreneurs pour booster leur esprit entrepreneurial. Il sied également de faire observer que tous les pays membres de la Communauté d’Afrique de l’Est, sauf le Burundi disposent des Bureaux d’Information sur le Crédit. Le Bureau d’information sur le Crédit devrait réduire l’asymétrie d’information entre les établissements de crédit et leurs clients potentiels ainsi que l’amélioration de la gestion des risques. L’amélioration des systèmes de paiement et leur ouverture à d’autres catégories d’acteurs du système financier devraient contribuer à l’accroissement de l’inclusion financière.

Les institutions financières doivent développer également des crédits de long terme pour permettre d’asseoir des investissements durables pour les microentrepreneurs afin de booster un développement durable et plus inclusif. Les entrepreneurs devraient eux aussi cultiver la culture de l’honnêteté, de volonté et du courage de régler leurs comptes et doivent surtout envisager la voie formelle pour bénéficier pleinement tous les services bancaires et les autres opportunités découlant du formel. Il faut aussi mettre en place des instruments fiscaux favorables à la survie des PME en vue de leur permettre d’améliorer l’environnement des affaires. Plaider enfin pour la mise en application de la loi sur les suretés mobilières. L’implémentation de cette loi pourrait pousser les banques à plus de largesse dans le traitement de leurs clients suite à une gamme nouvelle des garanties disponibles et réalisables.

A propos de nous :

Institute for Economics and Enterprises est une Think Tank basé au Burundi qui une mission de produire une société basée sur les principes du libre marché, de l’Etat de droit et de la propriété privée.

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